Co-organisateurs de la première rencontre du CNaV (Conseil National autoproclamé de la Vieillesse) à Bordeaux, qui s’est tenue le 11 mars dernier, les Boboyaka portent un projet d’habitat partagé innovant pour les seniors. Cette coopérative d’habitants constitue un modèle novateur qui remet en question les normes de l’habitat pour séniors plus classique. C’est dans le cadre du Wash Café à Bordeaux qu’a eu lieu une rencontre avec trois représentants des « Boboyaka La Castagne ».
« Boboyaka La Castagne », qu’est-ce que c’est ? Sylvie Dumard explique : « Une expérience d’habitat partagé pour des femmes de plus de 60 ans, répondant aux critères d’accès aux logements sociaux à Montreuil, connue sous le nom des Babayaga « les Sorcières » a été médiatisée en son temps et a servi de point de départ à différents projets en France ». Près de Bordeaux, les Boboyaka ont un projet différent, mais leur nom est un clin d’œil à l’aventure de Montreuil. La Castagne est le nom du quartier à Bégles où le projet verra le jour. «Nous sommes une coopérative d’habitants, explique Christiane Despagne , qui a fait le choix de la solidarité. Cela favorisera le maintien dans la structure de chaque membre de notre groupe ». Le point de départ des Boboyaka est une association qui a été créée en 2007. Elle était constituée, à ses débuts, par un groupe d’amis qui avaient été confrontés aux difficultés qu’ils rencontraient en tant qu’aidants de leurs parents vieillissants. Ils voulaient inventer quelque chose de nouveau pour leur propre vieillesse, sans devenir une charge pour leurs enfants. « Il s’agit de concevoir un habitat qui permette de vivre et de vieillir ensemble, mais chacun dans son appartement, dans un esprit d’entraide et de partage, tout en restant ouvert sur la cité » précise Philippe.
Un montage complexe, véritable « parcours du combattant »
Des fondateurs de 2007, il ne reste que trois membres. « Le chemin a été très long, car tout était à inventer. Il a fallu d’abord trouver la forme juridique adéquate et procéder aux différents montages financiers » explique Sylvie. Les Boboyaka se sont donc organisés en coopérative sur le principe d’une SCOP, chaque membre détenant des parts sociales. Le projet repose sur une mutualisation des moyens, matériels et humains. Les habitants seront propriétaires collectifs de l’immeuble (puisqu’ils détiendront des parts sociales de la coopérative) mais locataires de leur appartement. Ils paieront une redevance permettant à la société de rembourser les emprunts contractés pour financer la construction du bâti. Christiane précise : « Nos enfants n’hériteront pas de ces logements, ils seront proposés à d’autres personnes lorsqu’il y aura des départs ». L’habitant quittant son logement part avec la valeur des parts sociales qu’il détient. Quelle que soit la plus-value qu’aurait pu prendre l’immeuble.
Une aventure solidaire et humaine
Un terrain a été trouvé à Bègles. Le projet est accompagné par un bailleur social (le Comité Ouvrier du Logement) qui a acheté le terrain (fin 2022) pour le louer à la coopérative d’habitants. Le permis de construire est en cours. Les choses sont allées très lentement pour ce projet pionnier. Le trio des futurs Béglais nous confie qu’ils ont vraiment l’impression d’avoir eu beaucoup d’obstacles à franchir, mais que cela leur a permis aussi d’apprendre beaucoup. Philippe Michel nous explique : « Pour l’instant, treize personnes sont parties prenantes. Il reste donc sept places « à pourvoir ». Les nouveaux membres seront intégrés par cooptation. Les postulants doivent participer à nos week-ends de travail, adhérer au projet et après six mois ils seront (ou non) cooptés par les autres membres ». Il ajoute : « Les postulants sont nombreux, nous n’aurons aucun mal à être vingt. Nous pensons même à créer une liste d’attente ».
Un projet humaniste et innovant
Les Boboyaka La Castagne construisent dans la bonne humeur un projet égalitaire (une personne = une voix) où les décisions sont collectives et où chacun partage des valeurs d’égalité, de solidarité et d’entraide. Un équilibre réfléchi et maîtrisé entre la vie personnelle et le collectif. Elles et ils souhaitent un habitat favorisant la mixité, accueillant des couples aussi bien que des personnes seules, femmes et hommes. En collaboration étroite avec leurs architectes, (l’agence Les Dauphins à Bordeaux), ils ont conçu un habitat correspondant à leurs besoins, à leurs moyens et à leurs valeurs. Il s’agira d’un ensemble respectueux de l’environnement, composé de quatre bâtiments utilisant largement le bois et la chaux-chanvre. Chaque appartement pourra être modulable en cas de changement de situation de l’occupant. Les habitants auront accès à des espaces collectifs (buanderie, salon, chambre d’amis, cuisine et salle commune…) et à un espace vert. Tout est pensé pour favoriser les rencontres et les échanges tout en respectant l’intimité de chacun. Une micro-crèche (associée au projet dès ses débuts). Un local commercial et un studio d’étudiant permettront, non seulement de respecter le PLU (2), mais aussi de promouvoir la mixité sociale dans le projet. L’esprit pionner et l’optimisme semblent bien habiter le trio de coopérateurs. Sylvie conclut en souriant « Nous avons eu aussi un rôle pédagogique par rapport aux élus à qui nous avons régulièrement à faire ».
Rendez-vous dans quelques mois pour l’inauguration du projet « Boboyaka La Castagne ».
1- SCOP : Société Coopérative Ouvrière de Production
2-PLU : Plan local d’urbanisme
Dominique & Francis
Belle association !
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Bonjour,
Merci beaucoup pour ce bel article qui reprend bien nos dires! Juste un petit correctif, le projet boboyaka peut faire penser à une SCOP parce que les coopérateurs prennent des parts sociales n’est pas du tout productif au sens commercial. Les parts sociales permettent de partager le lieu à parts égales entre coopérateurs mais sans but lucratif. Au contraire, il permet à l’ensemble de la construction de rester hors de la spéculation foncière.
Merci encore beaucoup et au plaisir d’une prochaine rencontre
Sylvie
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