Que sont devenus les mots gascons, colorés et truculents, défendus par Guy Suire dans sa chronique de Sud-Ouest pendant près de vingt cinq ans de 1985 à 2011.
« Il y a encore chez nous des mots chargés de mémoire qui méritent d’être convoqués à la réception solennelle que confère l’écrit » évoquait M. Suire. Ainsi « Le dictionnaire définitif du bordeluche » rendez-vous hebdomadaire de Sud-Ouest, ouvert à tous les curieux, a été alimenté toutes ces années, par les lecteurs du journal toujours prêts à apporter commentaires et suggestions. Il témoigne de la richesse d’une langue en voie de disparition qui leur rappelle tant de souvenirs de jeunesse. Nombre de mots ponctuent encore le langage des Bordelais :
- « ça caille, baragouiner, gueille, arpions, cocougner ( ancêtre de cocooning ?) ».
- il est impossible aujourd’hui de traduire : « aller à mouille cul » : être enterré au cimetière de Sainte Croix (aujourd’hui disparu) parce qu’il était au bord de l’eau Bourde.
- « aller à la paille » : aller en prison. Lorsque les marchandes des quatre saisons ne pouvaient payer les amendes pour stationnement illégal, elles allaient au Fort du Ha… à la paille. Ces amendes étaient administrées par un agent de ville « obsédé de la contre-danse » surnommé Colgate en raison de ses « râteaux noirs » (illustration). La sortie de prison s’intitulait : revenir d’Arcachon.
Des communes en périphérie de Bordeaux ont gardé des noms de lieu-dit cocasses : « Plume-La -Poule» lieux-dits de Talence, était un rendez-vous de chasseurs … et d’amoureux. « Tartifume , lieu-dit à Begles : localement, aller à Tartifume , c’est aller au bout du monde, presqu’aussi loin que Tataouine ». La Baranquine, « carrefour célèbre à Bassens, était un débarcadère de gondoles (bordelaises) transport fluvial populaire ». Une curiosité demeure : « le Burdigala » ancien nom de Bordeaux mais aussi celui d’un cépage dont un pied demeure encore ( il daterait de Louis Philippe) place de la victoire, devant une enseigne commerciale.
Ont disparu de Bordeaux les bistrots de Bacalan, les marchandes des quatre saisons « à la charrette » aux Capucins, « les estaminets » de Bègles qui ont fait la saveur des mots bordeluche… « mais beaucoup, je l’espère retrouveront ce vocabulaire simple, modeste, familial, comme on retrouve un cousin éloigné».
Infos pratiques: Guy Suire : Les mots d ici : Le bordeluche dans tous ces états. Le Dictionnaire définitif du bordeluche. Illustration Iturriaz