John Cameron Mitchell fait l’honneur de participer à la 11ème édition du Fifib* qui, pour l’occasion, présente, en partenariat avec la cinémathèque, une rétrospective exceptionnelle consacrée au travail de cet acteur, chanteur et metteur en scène, figure phare de la scène Queer**.
Au programme de cette rétrospective, projection de films de ce réalisateur américain, intervention musicale au Village et une masterclass qui s’est déroulée le samedi 15 octobre au cinéma UGC. La médiation étant assurée par le critique de cinéma Franck Finance-Madureira et la traduction complice par Lily Hook.
Le chemin de l’identité artistique
Illustrée par de très courts extraits de films, cette masterclass retrace l’éclectisme et l’avant-gardisme de l’œuvre de John Cameron Mitchell d’une part et d’autre part, le fil de sa vie. Très jeune est venue chez lui la question « où est l’amour ?, qui ai-je le droit d’aimer ? ». Dès les années 70, John manifeste un grand intérêt pour les comédies musicales et en particulier pour Bob Fosse et son film All That Jazz. En 1985, commence sa carrière d’acteur en acceptant des rôles qui s’emparent du sujet queer**. Inspiré par le punk à l’image de David Bowie, John s’intéresse à l’idée que véhiculait la queerness « quelque chose qui brisait les règles morales, sociales et sexuelles » déjà présente en 1950 dans l’œuvre de Genet « un champ d’amour« .
En 1998 il se lance dans l’écriture de la comédie musicale Hedwig and the angry inch. Elle correspond à l’époque où l’identité queer** « devenait révolutionnaire, car en pleine épidémie du SIDA, elle suscitait une profonde haine et du mépris « ,précise le réalisateur. John remercie d’ailleurs le soutien des lesbiennes qui ne subissaient pas les conséquences de l’épidémie. Suivent des discussions à propos des films « Shortbus, How to talk to girls at parties », « Rabbit Hole » pour lesquels John Cameron avoue, « je suis plus intéressé par le processus de création, de générer quelque chose ensemble que par le résultat final».
D’une identité au «vivre ensemble»
Avec comme support le personnage de Hedwig, intervient une discussion autour du thème de l’identité. Hedwig est né garçon à Berlin-Est, il transgresse son identité par une opération chirurgicale pour suivre un GI américain. Hedwig se retrouve alors devant un mur qui sépare la liberté de l’absence de liberté. Pour John, « il y a peu de différence à être devant un mur ou sur un pont, c’est très douloureux d’être à cet endroit-là ».
John considère que la question légitime de l’identité aboutit de nos jours à la séparation. «J’entends l’importance de la question de l’identité, poursuit John, mais à un moment donné l’identité est là pour nous tirer vers le haut, pas pour nous séparer les uns des autres. On est pas amis parce que l’on est gay, ou queer… mais parce que l’on est contents d’être ensemble».
Bertrand Barrieu – Patrick Jallageas
*Festival International du Film Indépendant
** queer : après avoir été utilisé comme une injure en regard des minorités sexuelles et de genres le mot queer (signifiant «étrange» ou «bizarre» ) est repris par les homosexuel-les pour désigner leur propre mouvement.