Publié par Le Musée des Arts Décoratifs et du Design (le Madd) de Bordeaux crée l’événement en présentant jusqu’au 8 janvier 2023 et pour la première fois en France une rétrospective du travail de la «designer» italienne Nanda Vigo intitulée «l’espace intérieur».
Nanda Vigo (1936-2020) est née à Milan, elle étudie à l’École polytechnique fédérale de Lausanne et ouvre son studio à Milan en1959. Travaillant à l’intersection l’architecture, du design et de l’art, elle se définit comme inclassable, ce qui a quelque peu entravé sa visibilité. Son travail finit par être reconnu, ce qui lui permet de participer à de nombreuses manifestations à travers le monde, sauf en France. C’est le Madd de Bordeaux qui corrige cette lacune en montant l’exposition :«l’espace intérieur».
Expérience sensible immédiate pour le visiteur
Les deux commissaires de l’exposition, Victoire Brun et Justine Despretz, ont réussi à recomposer dans les cellules du musée des installations immersives qui conduisent le visiteur au cœur de l’œuvre novatrice de Nanda Vigo. Ici renaissent des créations et des espaces intérieurs aujourd’hui disparus. Le verre, la lumière, la spiritualité sont les éléments constitutifs des recherches conceptuelles de Nanda Vigo qui n’excluent pas contemplation et poésie: Ambiante Cronotopico (1968) et Trigger of the space (1970) sont nourris par son parcours ésotérique. Une autre ambiance est reconstituée au Madd : «utopie» conçue avec Lucio Fontana pour la 13ème triennale de Milan (1964). Ce corridor, de 12 mètres de long tout de rouge revêtu que le visiteur peut parcourir en suivant un sol modulé, est une plongée dans la communauté de pensée de ces deux artistes.
Ce volet expérimental n’occulte pas les réalisations faites pour des commanditaires. L’exposition représente des intérieurs comme celui de la « Casa blu » et celui du «Lo scarabée sotto la foglia » (le scarabée sous la feuille 1964-1969) qui est une maison construite à Malo (Italie) suivant les plans de l’architecte Gio Ponti. Nanda Vigo se voit confier l’aménagement intérieur de cette maison, ce qui lui donne l’opportunité de déployer tout son vocabulaire conceptuel. «Une partie du « mobilier », dont le canapé, est ancrée au bâtiment de façon à imposer un point de vue » explique Victoire Brun. Cette réalisation qui favorise la fusion de l’objet avec son environnement est immédiatement reconnue comme une œuvre majeure de la modernité. L’exposition présente d’autres réalisations : des luminaires (fruits de la collaboration avec la société Arredoluce), des chaises, poufs, tables et rangements.
Quelle est la place du design dans le monde de l’art ?
En ouverture de la conférence consacrée à «la place du design dans le marché de l’art », Justine Despretz répond à cette question en expliquant que d’une part « la plupart des designers sont des architectes, et que chaque objet du design est conçu comme une architecture » et que d’autre part un objet du design se distingue d’une œuvre d’art par le fait «qu’un objet du design a une fonction bien définie, éclairer, ranger, s’asseoir…, à contrario une œuvre d’art n’en a pas». Pourtant un objet de design, (qui peut-être une pièce unique à la différence d’un meuble produit en grande série), entre dans le champ de l’art quand il s’agit d’une pièce représentative d’une époque ou d’un courant, il perd sa fonction « il est alors installé dans un intérieur comme une sculpture ou comme un tableau » conclut Justine Despretz. Ces éclaircissements ramènent à la sagacité de Nanda Vigo qui «trouvait réducteurs les qualificatifs d’architecte, artiste ou désigner» défendant l’idée d’art total.
Le Madd: 39 rue Bouffard à Bordeaux
Renseignements: https://madd-bordeaux.fr/expositions/nanda-vigo-lespace-interieur
Photo en-tête : Cronotopo série 1963-65
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